1206 Sous les ailes sombres du Valhallaluia

De Caradoc
(Redirigé depuis Lettre de Panaverne)

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Les Caradociens et le « piège » de Vauvert.

Relaté par Rancelot

Sous les Ailes sombres du Valhallaluia

Depuis plusieurs mois, la côte Nord-Est de la Breutonnie en la province de Morvandie, subit des incursions de flotte vikingher. De nombreux Drakkars ont été vus, accostant dans des criques et remontant même certains cours d'eau. Ils proviennent de l'île de Galderland d'après les observateurs avertis, une lointaine et froide contrée des terres de la Norshka, avec à leur tête le glacial Grim Oluffalssen qui mène rudement ses hommes que l'ont dit être des guerriers habiles et sournois. Ils ont monté plusieurs enclaves vikinghers sans que l'on sache leurs intentions véritables. Mais ce n'est pas la première fois que la Norwandie reçoit une telle visite ; en effet, il y a près de cinquante ans, les terres de Valencour furent accordées à des migrants Vikinghers et ceux-ci sont maintenant bien établis et sédentarisés. Les Galderlanders seraient quant à eux plus accoutumés aux pillages et à la fuite...

Une troupe mercenaire venu du Gras-Duché de Beurretagne, la Compagnie de Saint-Caradoc, a de ce fait été envoyée en renfort pour soutenir Jean de Comblessac, baron du Vauvert, face à cette potentielle menace.


Voici comme épilogue, un courrier adressé par un milicien de Comblessac au Prince Grohann et à Dame Chateurine, régente du royaume de Breutonnie :


« Vos majestés,


J'ai couru longtemps afin de vous faire parvenir cette missive. Je reviens d'une longue fuite de ces terres que l'on nomme Vauvert. D'ignobles événements s'y sont déroulés et je crois bien que nous ne pourrons plus jamais voir ne serait-ce qu'un peu d'humanité sur ces terres maudites. Vous aviez missionné la compagnie Caradoc il y a de cela une semaine au jour où je vous écris, afin de soutenir plusieurs familles de colons face aux risques d'une invasion vikingher et aux pillages et meurtres qui en découleraient. Laissez-moi vous conter les sombres troubles qui se sont déroulés sous mes yeux impuissants.


Je suis arrivé à la ferme Vauvert dans la soirée avec le Baron Jean de Comblessac en ma qualité de milicien pour l'escorter. Afin d'apaiser les tensions entre paysans et vikinghers, Messire Jean avait fait organiser un petit banquet dans la cour intérieure. Les tables étaient sobrement dressées et les gens du Vauvert avaient apporté moultes spécialités locales à faire goûter. Tout semblait avoir été pensé pour que les festivités se déroulent sans encombre. L'ambiance était bon enfant, les Caradociens tentaient de mettre à l'aise les villageois en contant d'anciennes histoires truculentes et j'ai même pu remarquer que certains essayaient de faire goûter des alcools bien étranges au baron afin de lui faire signer contrats et ordonnances. Des colons vikinghers de la contrée voisine de Valencour avaient été payés par le baron Jean pour faire office de mercenaires supplémentaires et d'interprètes.

Les autres barbares du Galderland étaient bien là eux aussi! Mais sans leur chef, Grim Oluffalssen, et étrangement, c'est une garçonne au regard ombrageux du nom de Sorshka qui le remplaçait. Fort heureusement, ils se mêlèrent à la fête et semblaient avoir oublié leurs intentions belliqueuses pour la soirée.

L'alcool coulait à flot dans tous les gosiers et la valeureuse compagnie Caradoc s'appliquait à maintenir l'ordre pour que tout se passe au mieux, quoique certains n'hésitèrent pas non plus quad il fallut vilipender les rustres barbares lorsque ceux-ci manquèrent aux règles de savoir-vivre les plus élémentaires.

Le baron avait sorti Hypocras à foison pour remplir les godets des jouvencelles et les cornes à boire des barbares. La soirée battait son plein et des écus étaient distribués aux plus nécessiteux ou aux plus rapides...

C'est vers les 2 heures du matin, que nous nous aperçûmes que notre bien aimable baron avait disparu sans laisser de traces! Les recherches nocturnes furent brèves et infructueuses mais nous notions que Sorshka, la soi-disant cheffe guerrière de la bande, en avait profité pour partir dans les limbes... Moins d'une heure après, alors que les convives étaient soit complètement ivres, soit très inquiets de l'étonnante disparition du baron, un jeune vikingher qui avait été plus tôt écarté du banquet car trop aviné et injurieux envers la Breutonnie fut retrouvé criblé de coup de dague ce qui mit tragiquement un terme aux festivités...

Le lendemain, la tension était palpable et on apprit que les Vikinghers s'étaient tous regroupés dans les landes afin de projeter une attaque d'envergure. Les colons de la contrée voisine avaient donc choisi leur camp et se retournaient contre le Baron! Je pense qu'après une telle infamie il serait bon de délivrer croisade afin de réduire les colonies de Valencour à néant.

En ce matin, le prêtre de Vauvert, du nom de Père Blaise, choisit d'honorer une stèle en mémoire du baron disparu. Et c'est là que les premières altercations eurent lieu. La stèle fut brisée et c'est une bataille rangée opposant les fer-vêtus de la compagnie Caradoc à la horde des barbares vikinghers qui s'engagea.

Nos valeureux mercenaires Breutonniens repoussèrent la menace mais hélas, nos problèmes ne faisaient que commencer. Nos éclaireurs venaient en effet de pister un groupe de Vikinghers qui les avait conduits à la découverte d'un cairn où était enterré un héros vikingher de jadis avec un marteau ancestral aux pouvoirs magiques. C'est grâce à la vaillance de quelques villageois locaux tandis que les Caradociens repoussaient vaillamment les assaillants que nous pûmes récupérer cet étrange arme ou outil que semblait tant vouloir récupérer les barbares du Galderland. Était-ce lié à la découverte de ce maudit marteau, toujours est-il qu'un vent glacial se mit à souffler sur les plaines de Vauvert.

Nous dûmes ensuite escorter en cette fin de matinée, Jacques de Crèvecœur, négociant de son état, qui avait grand besoin du soutien des hommes d'armes présents afin de quitter la région sans encombre pour emmener ses marchandises en lieu sûr vers Couilleronne. C'est encore la compagnie Caradoc, de brillants guerriers vous dis-je, qui permirent aux marchandises de quitter la région sans encombre afin d'arriver à bon port.

Mais où était donc passée la terrible force vikingher que nous redoutions tant? C'est en redescendant dans la cour de la ferme du Vauvert que nous pûmes voir les barbares alignés dans la plaine, prêts à charger. Quel ne fût pas notre étonnement de reconnaître parmi eux, le visage déformé par quelques maléfices de notre bon baron Jean de Comblessac ainsi que le faciès ricanant de la terrible Sorshka. Nous fîmes tout notre possible malgré la fatigue pour repousser l'assaut mais hélas, la sorcellerie puissante de la cheffe vikingher fit que nombre de nos guerriers prirent les armes contre leur propre camp... Pis que tout, les villageois eux-mêmes furent possédés, se battant contre nous comme des diables. Je ne sais comment nous réussîmes finalement à cantonner les assaillants en dehors de la ferme le temps de reprendre des forces autour d'un bref repas, ce n'est pas pour rien que la compagnie est sous la protection de Saint-Caradoc, mais nous dûmes ensuite nous résoudre à abandonner les lieux le plus rapidement possible car c'est une véritable horde de possédés qui s'abattit sur nous... Je reconnus d'anciens villageois, d'anciens compagnons, et même quelques colons vikinghers de Valencour, les yeux injectés de sang, la mâchoire écumante tels des animaux enragés, se mouvant à une vitesse qui n'avait d'égale que la brutalité de leurs coups. Je n'ose imaginer ce qu'il advint de nos malheureux compagnons qui protégèrent notre déroute, ou furent juste moins prompts que nous autres à choisir la retraite la plus anarchique qu'il soit.


Au jour où vous lirez cette missive, je reste persuadé que la souillure de la baronnie de Vauvert est profonde et que ce maléfice pourrait s'étendre à d'autres proches contrées. La population breutonnienne n'est pas prête à affronter de tels maux. Si ces terres restent abandonnées par vos majestés, tôt ou tard nous en paierons le prix. »

Signé d'une croix par Antonin, milicien de Comblessac,
et rédigé par le vicaire Archibald de la paroisse de Panaverne.

Le sacrilège et la Fuite

Pris dans une tourmente dépassant tout ce que nous pouvions imaginer, fuyant dans la précipitation, sans chevaux ni vivres et transportant nos blessés, nous avons eu grand mal à nous en retourner sur nos terres. Affamés, nous n'étions plus que les restes d'une Compagnie exsangue et nous commettions sur notre route un immense sacrilège un jour de grande sécheresse à l'été 1206 en pillant et brûlant L'abbaye de Ker-ar-Berg, et nous en dérobions la sainte relique.

Ce méfait précéda notre retour au manoir de Saint-Caradoc où le Seigneur Le Guellec nous fit pourchasser et emprisonner. Les terres qu'ils nous avaient octroyées et nos biens furent confisqués, nos noms et notre réputation bafoués, certains devaient être condamnés à mort, d'autres à la servitude. Cependant personne ne pu mettre la main sur la relique dérobée que nous avions pris grand soin de cacher.

Mais le bon œil de Saint-Caradoc ne nous avait pas complètement abandonné car nous fûmes une bonne poignée à réussir à nous échapper en emportant quelques affaires. Nous nous sommes enfuis en Mauritanie, sur les conseils et avec l'aide de Dame Morvane, une noble partie à l'étranger pour je ne sais quelle raison et qui eu vent de nos mésaventures. Elle semblait très intéressée pour recruter des mercenaires prêt à tout pour échapper à leur funeste sort.

La Mauritanie, entre répit et bras de fer

Où comment nous dûmes négocier âprement le retour de nos compagnons contre la relique cachée.

À peine remis du voyage de près d'un mois à fond de cale dans un navire marchand, nous avons été questionné par Dame Morvane sur les tragiques aventures qui nous avaient amenées à cette situation peu enviable. Semblant peu émue par notre récit, elle chargea tout de même une certaine Kanasta de délivrer nos compagnons restants et de rapporter avec eux tout ce qui pourrait l'être. Celle-ci traversa la mer de Saphyr pour atteindre le Sud de la Breutonnie. Nous avions très vite compris devant l'insistance des questionnements de Dame Morvane que la relique lui important bien plus que nos piètres talents de mercenaires. Même si nous n'étions pas en position de force, une cordiale mais sèche entente s'installa entre mes compagnons et l'intéressée, nous distillions au compte-goutte, tel le plus pingre des alchimistes de l'Angouille, les informations sur l'endroit où nous avions caché la relique, prétextant parfois des trous de mémoire dus à notre détention afin de nous assurer de la libération de nos compagnons en échange. Je dois dire mon admiration devant la contenance de notre hôte face à nos propos souvent incohérents et je lui serai grâce à tout jamais de ne point nous avoir torturé...

Je ne sais par quel truchement, de la magie assurément, Dame Morvane me prodigua une vision de mes compagnons restés en Breutonnie, déguisés en gueux et qui montaient à bord d'un navire en partance pour la Mauritanie. Après une brève concertation, nous décidâmes de révéler enfin précisément l'endroit où nous avions caché la relique. Fouillant les environs du manoir de Saint-Caradoc en déjouant les rondes des gardes de notre ancien seigneur, Kanasta et son sens de la magie pu finalement retrouver la hanche de Nethras ; cette relique qui causa notre perte assurait cette fois notre salut.

Nous guettions chaque jour les nouveaux navires approchant les côtes. C'est finalement par une soirée des plus douce que nos autres compagnons débarquèrent sur la terre de Mauritanie et quelle ne fut pas notre joie et la leur lors de nos retrouvailles. Par chance certains avaient pu ramener de la vraie piquette breutonnienne, et même un peu de bière, car il faut dire qu'en cette région exotique, s'il n'est pas faux qu'il y fait un temps des plus agréables, il est véridique qu'il est impossible de trouver le moindre breuvage intéressant, l'alcool y étant strictement interdit !

Après avoir festoyé et vidé les quelques bouteilles en maudissant notre ancien seigneur à grand renfort de « Le Guellec au pain sec ! » et autres joyeusetés et par extension, toute la noblesse breutonnienne, notre retour dans nos appartements nous fit vite déchanter à défaut de nous faire véritablement dessaouler. Dame Morvane nous attendait, affichant un visage des plus fermé, entourée d'une dizaine de gardes à la peau d'ébène et armés de cimeterres certainement plus affutés que nos réflexes à cet instant précis... « Mercenaires, votre séjour ici touche à sa fin. Vous partirez dans la nuit rejoindre vos prochains commanditaires, en espérant que vous soyez meilleurs combattants que voleurs de relique... »

Escortez de près par les gardes, on nous fit monter dans d'étranges charrettes tirées par des sortes de gros ânes jaunes et bossus. La route fût longue mais nous permit de nous reposer. Nous arrivâmes sur une plage où des esquifs nous attendaient. La « Grande Traversée » pouvait commencer...

Suite : Anno 1207 - La Grande Traversée